Histoire de la Sagne en Camargue


Les lointains ancêtres d'André récoltaient déjà la sagne. Le 4 février 1302, Guigon de Roche, seigneur de l'époque, accorde aux "vrais habitants" le droit de cueillir les roseaux sur une partie de son marais. Ce privilège dure encore aujourd'hui, sur les parties communales de la roselière. Du Moyen Âge au début du XXème siècle, coupée verte en été et séchée sur place, la sagne assure la majeure partie des fourrages des ânes, mules et mulets. L'hiver, la coupe du roseau est rare : elle sert à recouvrir les cabanes de gardians et à fabriquer quelques "paillassons", des nattes de roseau destinées à protéger les cultures maraîchères.

Cabane de gardian et son toit en sagne

Sagneur tirant son bateau dans les marais

Sagneur de Camargue avec son fagot de roseau

Chasseur en Camargue

La roselière de Camargue, un écosystème fragile

Travail du sagneur en Camargue

L'histoire de la Sagne continue... Après la seconde guerre mondiale, la récolte de la sagne prend une autre dimension. Les besoins alimentaires énormes dans toute l'Europe poussent les pays du Nord, la Hollande notamment, à assécher leurs marais pour gagner des terres arables.
Ils sont alors en pénurie de roseaux, qu'ils utilisent pour couvrir les toits de leurs maisons. Les négociants partent en quête de nouvelles sources d'approvisionnement et découvrent le roseau de Camargue, d'excellente qualité. A partir des années cinquante, le marché se développe tant que les sagneurs se convertissent en nombre à l'exploitation du roseau d'hiver. C'est le début d'une ère dorée pour les habitants de Vauvert et de Gallician.
"La sagne c'est notre pétrole à nous", explique André. "Pas besoin de la planter, elle pousse toute seule. Il suffit de se baisser pour la ramasser."
L'association des sagneurs locaux compte jusqu'à 120 membres et les Vauverdois voient dans la sagne une activité très rentable.
"Le prix du paquet a longtemps suivi celui du Pastis", plaisante André. "Avec des records à 235 paquets par jour, les sagneurs gagnaient bien leur vie."



La roselière, un équilibre fragile
L'écosystème des marais fragilisé


Mais l'ecosysteme des marais de la roselière est fragile, et elle s'abîme peu à peu. Les sagneurs ne sont pas les seuls à arpenter ses 2000 hectares. Pêcheurs, chasseurs et éleveurs y sont aussi chez eux, et tous n'ont pas les mêmes intérêts. Surtout en ce qui concerne la gestion de l'eau dans les marais. "Les pêcheurs veulent de l'eau toute l'année et ils veulent maîtriser les entrées d'eau au moment du frai, note Alain Sandoz (*), chargé de recherche, les sagneurs désirent de courts assecs estivaux et surtout un renouvellement de l'eau. Les éleveurs ne veulent pas trop d'eau, pour avoir du pâturage. Les chasseurs de gibier d'eau, qui constituent un groupe de pression important, exigent une mise en eau estivale afin de pouvoir attirer le gibier dès l'ouverture de la chasse, mais également pour se déplacer en barque dans le marais."

Afin de gérer les entrées d'eau à leur guise, les propriétaires privés installent leurs propres digues. Résultat : des entrées d'eau salée et polluée via le canal du Rhône à Sète et des vidanges intempestives ont aggravé l'état du marais et des étangs. "Nous avons tous une part de responsabilité", reconnaît André. "Maintenant on essaye de réparer les dégâts, mais c'est trop tard. En tous cas concernant la Sagne. Les surfaces d'exploitation ont diminué, et le roseau est moins dense, moins haut, moins beau." Et la récolte moins rentable.
 


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